Loin de jouer les durs, ROCKY préfère baptiser son premier album “Soft Machines” d’après l’une de ses neuf chansons. Les vertiges de l’amour y sont chantés en anglais, quand ce n’est pas en langue togolaise mina, par leur chanteuse Inès Kokou, sur des musiques entre dancefloor à ciel ouvert et cocktail à deux, élaborées par les multi-instrumentistes Laurent Paingault, Tom Devos et Olivier Bruggeman.
Les nordistes Laurent et Tom se connaissent depuis la fin des années 1990. Rejoints par Olivier, ils initient depuis Lille avec une première formation pop rock mais ne résistent finalement pas à l’appel de la danse et des clubs. Bienvenue aux sons de Madchester, du New York du début des années 1980 et de la house originelle de Chicago, un Bizarre Love Triangle déjà vénéré mais désormais assumé par notre trio alors privé de voix. Celle d’Inès, grandie en banlieue parisienne entre Asnières et Villeneuve La Garenne, fan de R’n’B et du rap le plus contemporain, qui rencontre les chics types de ROCKY en 2010 via un ami commun, va alors leur indiquer la… voie à suivre.
Machine de guerre sur scène dès leurs débuts en 2011, leur premier concert ne sera autre qu’une première partie de The Shoes. La rencontre avec le duo rémois est d’ailleurs décisive puisqu’il demandera par la suite à ROCKY de remixer son tube planétaire « Time To Dance ». Sans pour autant se satisfaire de son répertoire dansant rôdé en tournée - unique équivalent français à ce jour des new-yorkais de LCD Soundsystem et des britanniques de Hot Chip - le groupe n’a pas peur de baisser la garde en studio.
Un maxi inaugural résolument électro-pop, produit par Guillaume Brière, moitié de The Shoes, et mixé par Stéphane Briat (Air, Sébastien Tellier, Phoenix…), sort en 2013. L’accueil radiophonique est bon, de Radio Nova à France Inter, avec à la clé des dates de concert jusqu’à l’année suivante.
Mais ROCKY pense déjà au coup d’après, un très gros coup : son futur premier album.
Les nouvelles chansons sont élaborées dans le studio-maison de ROCKY à Lille pendant l’année 2015, puis dans le cadre des studios ICP à Bruxelles, éventuellement revues et corrigées par le fidèle grand frère Guillaume Brière dans son propre studio à Reims. Le mixage est ensuite confié à Eric Broucek (Hercules & Love Affair, !!!, LCD Soundsystem) à l’exception de “I Hate You” et “Two Drops” qui passeront entre les mains de Julien Delfaud (Super Discount, Gaëtan Roussel, Woodkid).
Au printemps 2016 sort “Apologize”, premier extrait de l’album et amorce électro en trompe-l’œil : les huit autres chansons, où guitares et vraie batterie sont à l’honneur, sonnent véritablement pop, à l’image de l’enchaînement entre le rythmé et jouissif Big South, avec son saxophone final, et le surprenant et majestueux “Brandy And Monaco”, où la voix d’Inès transcende son statut de figure de proue à même de retourner les foules pour provoquer le grand frisson.
Puis on tombe à nouveau sous le charme de “Band Against The Wall”, titre emblématique déjà présent sur le EP de 2013, que le groupe à réenregistré comme pour mieux permettre de mesurer le chemin accompli. Parmi toutes les pistes explorées par l’album, que dire du solaire “Love Is A Soft Machine” ? La voix d’Inès semble y épouser l’accroche baggy d’une basse de New Order, le titre est une pépite disco-pop résolument moderne. ROCKY est bien sûr capable de conclure avec un “This Love”, cousin du “Our Love” de Caribou autant qu’héritier du tube house “Big Fun” d’Inner City Life alias Kevin Saunderson, pionnier de la techno originelle de Detroit.
ROCKY n’a que faire des étiquettes, le groupe est insaisissable, pop sans se compromettre, électronique sans tomber dans le piège de l’efficacité systématique, dédié c?ur et âme à la musique et dansant quand ça lui chante.
Aujourd’hui, aucun autre groupe de l’hexagone ne ressemble à ROCKY, et ROCKY ne ressemble à personne.